Richard Foss, Rum. A global history: ce petit livre d’environ 150 pages fait partie de la collection « The Edible Series » qui est dédiée à l’histoire de la cuisine et des boissons, proposant entre autres des volumes à propos de la banane, du hot dog, de l’olive ou de l’eau, en n’oubliant pas les alcools. En quelques chapitres, l’auteur retrace l’histoire du rhum, de ses origines à son déclin, puis à sa renaissance actuelle. Il parle également de son rôle dans divers événement politiques, tout particulièrement de l’histoire des Etats-Unis. Il décrit sa fabrication et sa diffusion dans le monde entier et propose quelques recettes de cocktails et de plats cuisinés, surtout des recettes historiques d’ailleurs, comme le Rum punch de Martha Washington datant de 1780. Il s’agit plus d’une introduction que d’un livre de fond mais le concept est intéressant et permet de se former rapidement une idée sur le sujet.
rhum
The curious bartender’s rum revolution
Tristan Stephenson, The curious bartender’s rum revolution: divisé en quatre grands chapitres, ce livre est plus qu’une introduction au rhum. L’auteur relate son histoire et précise les différentes manières de le fabriquer avant de nous embarquer dans une visite de plus d’une cinquantaine de distilleries classées par pays (essentiellement dans les Caraïbes, en Amérique Centrale et en Amérique du Sud – des distilleries d’ailleurs sont citées en fin d’ouvrage). Il propose également plus de 250 notes de dégustation ainsi que quelques recettes de cocktails. Les recherches ont été minutieuses et très souvent effectuées sur place – Stephenson n’hésite pas à écrire quelques anecdotes à propos de ses visites. Le livre est également illustré par de nombreuses photos. Mon seul bémol pour ce livre passionnant serait, pour certains chapitres, le choix d’un papier de couleur un peu trop foncée pour le confort de la lecture, mais ce n’est qu’un détail comparé à la richesse du contenu. Un des meilleurs livres à propos du rhum – et surtout très complet.
East India Negroni
L’East India Negroni a été créé par Jim Meehan à l’automne 2009. Il s’est inspiré du grand classique qu’est le negroni pour composer une recette à base de rhum. C’est un sherry qui remplace le vermouth, mais un sherry particulier, l’East India Solera. Mélange d’oloroso et de Pedro Ximénez, il est vieilli dans une cave chaude et humide, dans des conditions qui ressemblent à celle d’un voilier en voyage transatlantique. N’essayez pas avec un autre sherry, vous obtiendrez un goût différent et le nom du cocktail perdra son sens.
J’ai trouvé la recette dans le tout nouveau livre de Jim Meehan, Meehan’s bartender manual:
- 6 cl de rhum Banks 5-Islands (Meehan propose comme remplacement de l’Appleton Reserve ou du Mount Gay Black Barrel)
- 2,2 cl de sherry East India Solera de Lustau
- 2,2 cl de Campari
- un zeste d’orange pour décorer
Verser tous les ingrédients avec des glaçons dans un verre à mélange et remuer pour refroidir. Verser dans un verre old fashioned contenant un grand glaçon. Décorer avec le zeste d’orange.
Difficulté: ce cocktail utilise un ingrédient particulier, le sherry East India Solera que j’ai trouvé sur le net. Le rhum Banks vient du même site, il me semble, mais doit se trouver chez des cavistes.
Goût: ce cocktail possède les caractéristiques du negroni mais les nuances sont différentes. Le rhum s’associe parfaitement bien au sherry et au Campari, créant un mélange sucré-amer avec une touche de noisette. Ce cocktail est de suite devenu un de mes favoris et la bouteille de sherry ne fera pas long feu.
El Dorado
J’ai continué mon exploration des cocktails contenant de la liqueur de yaourt et j’ai préparé l’El Dorado que j’ai trouvé sur le site de Bols. Il y est décrit comme la combinaison de l’or des Caraïbes – le rhum – et de l’or blanc d ela liqueur.
- 3 cl de liqueur de yaourt Bols
- 3 cl de rhum vieux (Original Dark Plantation)
- 1,5 cl de Pedro Ximenez Sherry
- 2 traits de bitters Angostura
Mettre tous les ingrédients dans un shaker avec des glaçons et secouer vivement. Filtrer dans un verre à martini ou à cocktail refroidi.
Difficulté: ** rien de très compliqué – dommage qu’il n’y ait pas plus d’indication sur le rhum utilisé
Goût: autant le dire de suite, j’ai trouvé ce cocktail assez imbuvable. La liqueur de yaourt domine, colle dans la bouche et ruine le bon rhum qu’on y a ajouté. Le sherry ne se repère qu’à peine. De plus, avec le temps, le mélange se dissocie et n’est plus très beau à voir. Je compte encore tester une recette avec cette liqueur mais après, je pense que cela suffira !
Royal daiquiri
Mélange de rhum, citron vert et sucre, le daiquiri est une base solide pour créer de nombreuses déclinaisons. Don The Beachcomber a concocté diverses versions, dont ce Royal Daiquiri à base de Parfait Amour datant des alentours de 1950. Parfait Amour ? c’est une liqueur qui est passée de mode et qui ne se retrouve plus jamais dans les cocktails contemporains mais elle se trouve encore relativement facilement dans des magasins spécialisés. Des grandes marques comme Bols, Giffard ou Marie Brizard la proposent dans leur gamme. Elle se fait remarquer par sa couleur violette. C’est en fait un curaçao à l’orange auquel ont été rajoutés des arômes de rose, de vanille et d’amande. Le goût peut varier selon la marque choisie.
J’ai traduit la recette trouvée dans Beachbum Berry remixed de Jeff Berry:
- 0,5 oz (1,5 cl) de jus de citron vert
- 0,5 oz (1,5 cl) de parfait amour (Marie Brizard)
- 1/4 de cuillère à thé de sirop de sucre
- 1,5 oz (4,5 cl) de rhum léger de Porto Rico (Havana Club añejo 3 anos)
- 4 oz (1/2 tasse) de glace pilée
La recette préconise de mettre tous les ingrédients dans un blender et de mixer pendant 5 secondes, puis de filtrer dans un verre à cocktail refroidi. J’avoue que j’ai été prise de paresse et que j’ai réalisé ce cocktail au shaker, avec des glaçons. Est-ce que cela fait une grande différence ? pas sûr !
Difficulté: **(*) le parfait amour se trouve en magasins spécialisés et n’est pas souvent utilisé dans les cocktails. Pour le reste, que du basique.
Goût: un daiquiri sucré et parfumé, mettant en avant les caractéristiques florales et orangées du parfait amour.
Rum. De complete gids
Isabel Boons & Tom Neijens, Rum. De complete gids: les éditions flamandes Lannoo éditent depuis quelques années des guides très complets sur les alcools. Celui sur le rhum a été co-écrit par Tom Neijens, officiant à The Drifter, bar tiki situé à Gand. Après une introduction très instructive parlant de l’histoire du rhum et des différents types de distillation, le livre est divisé en plusieurs chapitres regroupant les alcools par type: rhums de type anglais, espagnol et français ainsi que des inclassables (Plantation par exemple se retrouve dans cette catégorie vu que la marque offre des rhums de diverses origines). Ce classement par type me semble très utile pour mieux catégoriser dans ma tête les différents rhums. Chaque fiche est consacrée à une marque (et non à un rhum précis). Un petit tableau très instructif détaille les divers types, avec leur degré d’alcool et s’il s’agit d’un blend ou d’un single cask, s’il a été vieilli une seconde fois, s’il est épicé ou arrangé. Les textes descriptifs sont par contre très courts. En conclusion, des cocktails classiques et tiki sont expliqués, de même que les accords rhum-cigare (j’avoue que je n’ai pas lu cette partie). Enfin quelques bars internationaux sont présentés. J’ai une petite préférence pour ce livre par rapport à celui d’Alexandre Vingtier même si je regrette la brièveté des textes et que les deux se complètent de toutes façons.
Smuggler’s cove
Martin & Rebecca Cate, Smuggler’s cove: exotic cocktails, rum, and the cult of tiki: dans cet excellent nouveau livre sur le monde des cocktails tiki, Martin et Rebecca Cate racontent l’histoire de leur bar de San Francisco, mais ils vont bien plus loin. Ils retracent l’histoire du cocktail exotique, parlant de Donn the Beachcomber et Trader Vic, des grands temples américains du tiki (dont certains existent encore aujourd’hui) et de la décoration. Chaque chapitre est entrecoupé de recettes, des classiques évidemment, mais aussi beaucoup de recettes contemporaines, ce qui est tout l’intérêt du livre. La partie sur les différents rhums est également très instructive. Martin Cate ne les classe pas selon les critère habituels (style espagnol / britannique / français) mais selon leur mode de fabrication et leur composition et propose pour chaque catégorie une liste de rhums correspondants, que l’on peut utiliser selon ses envies dans les cocktails. Pour donner une idée, les plus utilisés sont « pot still lightly aged » (beaucoup de rhums très locaux des Etats-Unis – j’ai cependant trouvé dans ma collection le Rum Nation Jamaïca 8 years), « blended lightly aged » (Plantation 3 Stars, Mount Gay Eclipse, Banks 5 Islands…), « blended aged » (Doorly 5 years, Appleton 12 years, El Dorado 5 years…), « column still aged » (Angostura 1919, Zacapa 23…), « black blended » (j’ai enfin trouvé une nouvelle utilisation pour le Goslings’s Black Seal), et puis les agricoles et la cachaça. Richement illustré, le livre se termine avec de nombreux conseils pour l’organisation d’une soirée tiki. Un livre qui a tout de suite pris une place parmi les classiques.
Pineapple daiquiri
En présentant le daiquiri, je disais qu’il s’agissait d’un cocktail très versatile et qu’il existait de nombreuses déclinaisons. En voici une qui utilise le rhum Plantation Pineapple. Celui-ci a fait beaucoup parler de lui et a longuement été attendu. En fait, je n’aurais jamais dû avoir une bouteille: il a été créé en petite quantité pour le Tales of the Cocktails 2014 à la demande de David Wondrich (Imbibe). Le public a immédiatement été conquis, si bien qu’Alexandre Gabriel de Plantation a décider d’ajouter ce rhum à son catalogue. Il aura fallu attendu le printemps 2016 pour qu’il soit disponible sur le marché européen où il a également fait fureur (le stock du magasin Tasttoe où je l’ai acheté a été épuisé en un samedi).
Alexandre Gabriel et David Wondrich se sont inspirés de recettes datant de la première moitié du 19e siècle, une époque où le rhum était souvent aromatisé pour masquer son goût peu avenant. Le nom de Stiggins’ Fancy est une référence au révérend Stiggins du roman de Charles Dickens, Aventures de Monsieur Pickwick, dont c’est la boisson préférée. Ce rhum est fabriqué à partir d’ananas victoria (de la Réunion) pelés à la main, et ces pelures sont infusées pendant une semaine dans du rhum 3 stars blanc puis le tout est distillé. La chair est quant à elle infusée pendant trois mois dans le rhum Original Dark, beaucoup plus riche. Les deux liquides sont ensuite rassemblés et mis en fûts où ils reposent pendant trois mois. Contrairement à d’autres rhums aromatisés, le goût est très naturel, offrant des notes d’ananas sucré tout en laissant le rhum se développer. Une réussite !
- 6 cl de rhum Plantation Pineapple
- 2 cl de jus de citron vert frais
- 1 cuillère à thé de sucre blanc fin
Dans le fond du shaker, dissoudre le sucre dans le jus de lime. Ajouter le rhum et remplir de glaçons, puis secouer comme si votre vie en dépendait. Filtrer dans un verre à cocktail.
Difficulté: ** tentez de trouver un bouteille de ce rhum chez un caviste, vous ne le regretterez pas !
Goût: des arômes d’ananas, évidemment mais également le rappel du daiquiri classique.
120 rhums
Alexandre Vingtier, 120 rhums: 120 rhums c’est 120 fiches décrivant rhums et cachaça du monde entier. Chaque double page présente un alcool en particulier, avec diverses indications comme la provenance, la distillerie, le type, le mode de distillation, le vieillissement, le degré et la gamme de prix ainsi que des notes de dégustation (couleur, nez, bouche et finale). Alexandre Vingtier a également écrit un texte de présentation racontant, selon les rhums, diverses choses: son histoire, sa distillation, des anecdotes, donnant au final un panorama assez complet sur le monde du rhum. Livre de référence, il peut se consulter à tout moment mais également être lu de bout à bout. C’est un ouvrage très intéressant mais j’aurais aimé lire une introduction plus complète décrivant les types de rhums et les différentes manières de les distiller, ce n’est sans doute pas dans la ligne éditoriale de la collection. Un livre que je consulte fréquemment depuis mon achat et qui m’est bien utile pour découvrir de nouveaux rhums.
Royal Bermuda Yachtclub Cocktail
Ce cocktail, créé en hommage au Royal Bermuda Yachtclub fondé aux Bermudes en 1884 et visité essentiellement par les officiers du 20e régiment de l’armée britannique, apparaît pour la première fois dans le recueil de Crosby Gaige, Cocktail Guide and Ladies Home Companion, publié en 1941. Les proportions sont un peu différentes que celles citées ci-dessous, avec plus de rhum, moins de jus de citron vert et le choix entre du falernum et du sirop de sucre et le choix entre un trait de Cointreau ou de brandy, deux choses fort différentes.
Trader Vic alias Victor Bergeron (je reparlerai de lui – c’est un personnage important dans le monde du cocktail tiki) affine la recette, éliminant les différentes possibilités en faveur d’un goût plus prononcé, gardant donc les traits de falernum et de Cointreau. Il publie la recette en 1947 dans son premier recueil, Trader’s Vic Bartender Guide. Ce livre est un témoignage de ses recherches dans le domaine des cocktails tropicaux, qui ne sont pas encore tiki à cette époque. Il est très proche d’un daiquiri: rhum, jus de citron, sucre – ou la « Sainte Trinité du Cocktail des Caraïbes », comme dirait Jeff Berry.
J’ai suivi la recette du PDT Cocktail Book de Jim Meehan, un peu différente et plus aisée au niveau des quantités que celle de Ted Haigh dans Vintage Spirits and Forgotten Cocktails. Elle rajoute un peu de Cointreau (2 dashes dans le recette originale) et de falernum (2 cuillères à thé).
- 2 oz de rhum des Barbades (Mount Gay Eclipse ambré)
- 1 oz de jus de citron vert pressé
- 0,5 oz de Cointreau (ou de Creole Shrubb de Clement, une liqueur d’orange sur une base de rhum)
- 0,5 oz de falernum
Mélanger le tout dans shaker avec des glaçons et filtrer dans une coupe refroidie. Décorer avec une tranche de lime.
Difficulté: *** Le rhum Mount Gay Eclipse se trouve chez des cavistes, il pourrait être remplacé par un rhum ambré cubain mais le goût sera différent, moins doux, et ce sera un autre cocktail. J’utilise du falernum maison, une liqueur aromatisée aux amandes, gingembre, citron vert et clous de girofle (de nombreuses recettes existent sur le net – la mienne vient d’un site aujourd’hui disparu). Cela existe aussi sous forme de sirop, notamment chez Monin (aucune idée du goût). Cela vaut la peine d’en fabriquer ou d’en acheter si vous comptez réaliser de nombreux cocktails tiki dans lesquels il est un ingrédient très courant. Que ce soit avec du Cointreau ou du Creole Shrubb, les deux versions sont délicieuses.
Goût: acidulé, avec une touche épicée venant du falernum et du rhum. Très frais et estival tout en étant élégant et subtil. Vous n’avez peut-être pas l’occasion d’aller aux Bermudes mais ce cocktail vous fera voyager vers les contrées caribéennes !