White Witch

White Witch

Ce cocktail est à la base une création de Trader Vic’s qu’il avait publiée dans son Trader Vic’s Bartender’s Guide (l’édition de 1972). La recette a été adaptée par Ezra Star du bar Drink de Boston. Ce dernier a remplacé les glaçons par de la glace pilée et le Cointreau par du curaçao sec et moins sucré. Il omet également le saupoudrage de sucre glace qu’il trouve trop salissant.

La recette se trouve sur le site de Punch:

  • un demi citron vert pressé
  • 0,5 oz (1,5 cl) de curaçao (Pierre Ferrand)
  • 0,5 oz (1,5 cl) de crème de cacao blanche (Monin)
  • 1 oz (3 cl) de rhum jamaïcain blanc overproof (Wray & Nephew)
  • de l’eau pétillante pour compléter
  • décoration: la peau du demi citron vert pressé et de la menthe

Mettre tous les ingrédients (sauf l’eau pétillante) dans un verre collins rempli de glace pilée et touiller avec un bâton lélé (ou swizzle stick). Ajouter l’eau pétillante et décorer du demi citron vert pressé et d’un brin de menthe.

Difficulté: *** des ingrédients de caviste mais souvent utilisés dans les cocktails.

Goût: un cocktail frais, sucré et épicé qui a besoin d’une belle quantité de glace pilée et d’une certaine dilution. Le seul souci, c’est qu’il se boit vraiment facilement mais qu’il est traître avec son rhum à 63°.

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Fog Cutter

Fog Cutter

Le Fog Cutter est un cocktail classique du répertoire tiki, probablement créé par Trader Vic pendant la Seconde Guerre mondiale. Il se démarque des autres classiques par son mélange de divers alcools (il est quelque part un précurseur du Long Island Ice Tea). Son nom impliquerait qu’il dissipe le brouillard mais la grande quantité d’alcool provoque plutôt le contraire ! Trader Vic a par la suite remplacé sa recette originale par le Samoan Fog Cutter, plus léger, plus dilué par l’usage de glace pilée.

Ce cocktail est un des plus connus de Trader Vic, après le Mai Tai et le Scorpion. Il a souvent été modifié dans les divers bars et restaurants où il était à la carte et possédait son propre mug (il en existe des dizaines de modèles différents). Il existe des recettes plus modernes où le cognac est remplacé par du pisco – ce que je testerai un jour.

La recette du jour vient de Beachbum Berry remixed:

  • 6 cl de jus de citron
  • 3 cl de jus d’orange
  • 1,5 cl de sirop d’orgeat (Routin 1833)
  • 6 cl de rhum léger de Porto Rico (Plantation 3 Stars)
  • 3 cl de cognac (Pierre Ferrand)
  • 1,5 cl de gin (Tanqueray)
  • 1,5 cl de cream sherry (sherry sec auquel j’ai rajouté un peu de sirop de sucre)

Mettre tous les ingrédients, sauf le sherry, dans un shaker avec des glaçons et secouer. Verser sans filtrer dans un mug Fog Cutter et ajouter de la glace si nécessaire. Verser par dessus le sherry et décorer d’un brin de menthe.

Difficulté: *** beaucoup d’ingrédients mais rien de très compliqué à trouver. La principale difficulté que j’ai rencontrée est liée à la taille de mon mug, acheté Trader Vic à Tokyo. Il est tellement grand qu’il faut une quantité impressionnante de glaçons.

Goût: un cocktail frais mais fort, à boire à son aise, dans lequel la multitude d’alcools se marie avec bonheur. Fruité et épicé.

Samoan Fog Cutter

Samoan Fog Cutter

Créé dans les années 1940 par Trader Vic, le Fog Cutter est un de ces cocktails qui marient différents alcools en grande quantité, tout comme le Long Island Ice Tea. Pas besoin de boire plus deux verres pour se retrouver dans le brouillard le plus complet avec cette première version ! Trader Vic a donc concocté le Samoan Fog Cutter un décennie plus tard, diminuant les doses d’alcool et utilisant de la glace pilée qui rallonge quelque peu la boisson. Ce cocktail est devenu un classique de Trader Vic, après le Mai Tai et le Scorpion, et a connu de nombreuses versions, son créateur ayant publié la recette en 1947 dans son Bartender’s Guide.  A vrai dire, le Fog Cutter est un Scorpion auquel il a ajouté du gin et du sherry. Il contient tous les éléments typiques d’un cocktail de Trader Vic, le démarquant de ceux de Donn The Beachcomber: du jus de citron et non de lime, du sirop d’orgeat, un mélange de plusieurs alcools plutôt qu’une combinaison de rhums. Jeff Berry propose la recette originale dans Remixed mais aussi la version samoane que j’ai préparé et qu’il considère comme bien plus équilibrée.

La recette vient donc de Jeff Berry, Beachbum Berry remixed:

  • 6 cl de jus de citron pressé
  • 3 cl de jus d’orange pressé
  • 1,5 cl de sirop d’orgeat (Giffard)
  • 1,5 cl de cognac (Gautier VSOP)
  • 1,5 cl de gin (Beefeater)
  • 4,5 cl de rhum léger portoricain (Banks 5)
  • 1,5 cl de cream sherry (Osborne manzanilla sucré)
  • 1 tasse (cup) de glace pilée

Mettre tous les ingrédients sauf le sherry dans un blender et mixer pendant dix secondes. Verser sans filtrer dans un mug Fog Cutter ou dans un verre collins ou dans un autre mug et ajouter de la glace pour remplir si nécessaire. Verser le sherry par dessus et décorer d’un brin de menthe.

Difficulté: **(*) même s’il faut beaucoup d’ingrédients, tout est facilement trouvable en supermarché. En rhum, il y a moyen d’utiliser du Havana Club 3 años ou du Plantation 3*. Le cream sherry est quelque chose d’assez inconnu par ici, c’est souvent utilisé en pâtisserie dans les pays anglo-saxons et en gros, si j’ai bien compris, c’est du sherry sucré. J’ai donc rajouté un peu de sucre dans mon sherry sec et ça fait l’affaire. Des recettes plus modernes utilisent d’ailleurs du sherry dry.

Goût: un cocktail frais et peu sucré. Difficile de vraiment bien distinguer chacun des alcools à part le sherry qui ajoute une touche spéciale.

En bonus, un clip (en anglais) qui explique l’histoire du cocktail et qui propose la recette de Martin Cate du Smuggler’s Cove:

Mai Tai

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Le Mai Tai est un de ces cocktails mythiques aux nombreuses recettes, souvent des pâles copies de l’originale. Trader Vic raconte dans son autobiographie comment le cocktail est né. En 1944, un soir dans son bar d’Oakland, lui et son barman décident de créer le meilleur cocktail possible. Vic le sert à un couple d’amis originaires de Tahiti qui le trouvent « mai tai », excellent donc. Malgré cette histoire, son origine est controversée, impliquant différents créateurs et procès entre ceux-ci. Jeff Berry a tenté de démêler le vrai du faux et est arrivé à la conclusion que Trader Vic est bien le créateur de ce cocktail. Mais il s’est inspiré d’autres recettes, celle du QB Cooler que servait Don The Beachcomber, que Vic a très certainement goûtée mais qui n’a en commun que le citron vert et le rhum (et encore, des rhums différents). Il s’est très certainement basé également sur des recettes de Constante, le barman du bar La Florida de La Havane: le Golden Glove contient les mêmes ingrédients sauf l’orgeat et dans le Daiquiri n°2, il faut juste remplacer le jus d’orange par l’orgeat. Peu importe, le Mai Tai tel qu’il a été composé est un excellent cocktail, fort simple avec ses 5 ingrédients. A l’origine, il ne comportait qu’un seul rhum, du Wray & Nephew de 17 ans d’âge, un alcool qui n’existe plus. Jeff Berry a donc proposé un mélange de deux rhums, un jamaïcain brun et un agricole ambré, mais les combinaisons sont infinies comme le démontrent Matt Robold et Tiare.

Le succès de ce cocktail n’a pas été immédiat. La première référence dans la presse ne date que de 1955 et parle de ce cocktail en rapport avec Hawaï où il était servi au Royal Hawaiian Hotel. La recette originale étant secrète, des barmen ont inventé leur propre version, souvent composée de rhum et de jus d’ananas et décorée avec une orchidée et un petit parasol. De plus en plus populaire, le cocktail symbolise les vacances hawaïennes, le paradis au détour d’un verre et il se répand partout aux Etats-Unis où il devient le breuvage le plus demandé des années 60. Trader Vic se bat à cette époque pour la paternité du Mai Tai car tout le monde pense qu’il a été inventé par les Hawaïens ou Tahitiens. Il fait de la publicité pour ses restaurants en les nommant « The home of the Mai Tai » et crée sa propre ligne de produits, des rhums Mai Tai et des mix Mai Tai. Il attaque même en justice un autre fabricant de sirops qui insinue qu’il était le créateur du Mai Tai. Celui-ci n’est autre que Don The Beachcomber, jaloux du succès de ce cocktail tiki qu’il n’a pas inventé alors qu’il en a créé tant d’autres moins populaires. Trader Vic gagne le procès mais cela le force à publier sa recette secrète.

Je vous propose ici la recette de Trader Vic, telle qu’elle est adaptée dans Beachbum Berry Remixed:

  • 1 oz de jus de citron vert pressé
  • 1/2 oz de curaçao orange (Cointreau, mais d’autres sont possibles, comme du Pierre Ferrand)
  • 1/4 oz de sirop d’orgeat (Giffard, Monin est bien également)
  • 1/4 oz de sirop de sucre (ou moins selon les goûts)
  • 1 oz de rhum brun jamaïcain (Appleton Extra 12 ans)
  • 1 oz de rhum ambré martiniquais (Saint James ambré, ou Clément VSOP)

Mélanger tous les ingrédients dans un shaker avec de la glace pilée. Verser dans un grand verre old-fashioned. Décorer en y plongeant la peau retournée du citron vert pressé et garnir avec une feuille de menthe ou une orchidée.

Difficulté: *** pas extrêmement difficile mais demande les ingrédients précis pour obtenir un bon résultat.

Goût: c’est un cocktail aux nombreuses dimensions: le goût fort et aromatisé du rhum, l’acidité du jus de citron, le sucré orangé du curaçao et l’amande de l’orgeat. Une délicieuse recette extrêmement équilibrée qui mérite sa popularité.

Royal Bermuda Yachtclub Cocktail

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Ce cocktail, créé en hommage au Royal Bermuda Yachtclub fondé aux Bermudes en 1884 et visité essentiellement par les officiers du 20e régiment de l’armée britannique, apparaît pour la première fois dans le recueil de Crosby Gaige, Cocktail Guide and Ladies Home Companion, publié en 1941. Les proportions sont un peu différentes que celles citées ci-dessous, avec plus de rhum, moins de jus de citron vert et le choix entre du falernum et du sirop de sucre et le choix entre un trait de Cointreau ou de brandy, deux choses fort différentes.

Trader Vic alias Victor Bergeron (je reparlerai de lui – c’est un personnage important dans le monde du cocktail tiki) affine la recette, éliminant les différentes possibilités en faveur d’un goût plus prononcé, gardant donc les traits de falernum et de Cointreau. Il publie la recette en 1947 dans son premier recueil, Trader’s Vic Bartender Guide. Ce livre est un témoignage de ses recherches dans le domaine des cocktails tropicaux, qui ne sont pas encore tiki à cette époque. Il est très proche d’un daiquiri: rhum, jus de citron, sucre – ou la « Sainte Trinité du Cocktail des Caraïbes », comme dirait Jeff Berry.

J’ai suivi la recette du PDT Cocktail Book de Jim Meehan, un peu différente et plus aisée au niveau des quantités que celle de Ted Haigh dans Vintage Spirits and Forgotten Cocktails. Elle rajoute un peu de Cointreau (2 dashes dans le recette originale) et de falernum (2 cuillères à thé).

  • 2 oz de rhum des Barbades (Mount Gay Eclipse ambré)
  • 1 oz de jus de citron vert pressé
  • 0,5 oz de Cointreau (ou de Creole Shrubb de Clement, une liqueur d’orange sur une base de rhum)
  • 0,5 oz de falernum

Mélanger le tout dans shaker avec des glaçons et filtrer dans une coupe refroidie. Décorer avec une tranche de lime.

Difficulté: *** Le rhum Mount Gay Eclipse se trouve chez des cavistes, il pourrait être remplacé par un rhum ambré cubain mais le goût sera différent, moins doux, et ce sera un autre cocktail. J’utilise du falernum maison, une liqueur aromatisée aux amandes, gingembre, citron vert et clous de girofle (de nombreuses recettes existent sur le net – la mienne vient d’un site aujourd’hui disparu). Cela existe aussi sous forme de sirop, notamment chez Monin (aucune idée du goût). Cela vaut la peine d’en fabriquer ou d’en acheter si vous comptez réaliser de nombreux cocktails tiki dans lesquels il est un ingrédient très courant. Que ce soit avec du Cointreau ou du Creole Shrubb, les deux versions sont délicieuses.

Goût: acidulé, avec une touche épicée venant du falernum et du rhum. Très frais et estival tout en étant élégant et subtil. Vous n’avez peut-être pas l’occasion d’aller aux Bermudes mais ce cocktail vous fera voyager vers les contrées caribéennes !

Tortuga

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Créé vers 1939 par Trader Vic, un des grands maîtres du cocktail tiki avec Donn The Beachcomber, le Tortuga est une boisson exotique s’inspirant clairement du La Florida Cocktail de Constante. Il contient tout comme celui-ci un mélange de vermouth – cacao – curaçao – grenadine, mais Trader Vic y a rajouté des agrumes et du rhum overproof. Sur son menu de 1940, il propose ce cocktail comme une alternative au Zombie de Donn The Beachcomber.

  • 1 oz de rhum demerara Lemon Hart 151 proof
  • 1 oz de rhum Havana Club 123 proof (un rhum qui n’existe plus, Beachbum Berry – la recette se trouve dans deux de ses livres – propose de le remplacer par soit 1 1/4 oz de Havana Club Seleccion de Maestros, soit 3/4 oz de Bacardi 151 proof. Je n’ai aucun des deux à ma disposition et je l’ai donc remplacé par 1 1/4 oz de Havana Club Especial)
  • 1 oz de vermouth italien (Martini blanc)
  • 1/2 oz de curaçao (Pierre Ferrand)
  • 1/2 oz de crème de cacao blanc (Monin)
  • 1/2 oz de jus de citron vert pressé
  • 1/2 oz de jus de citron pressé
  • 1/2 oz de jus d’orange pressée
  • 1/4 oz de grenadine

Mélanger tous les ingrédients avec des glaçons dans un shaker, verser dans un verre à long drink et compléter avec de la glace pilée. Décorer le verre avec des tranches de citron vert et un brin de menthe.

Difficulté: *** (différents ingrédients sont peu courants, mais libre à vous de jouer avec les rhums)

Goût: un La Florida Cocktail en long drink, avec une belle dose d’alcool, les notes amères du vermouth, le goût puissant du rhum Lemon Hart, un peu de sucre en équilibre avec une certaine acidité. Parfait pour l’été avec beaucoup de glace pilée.

J’ai refait des photos un peu plus tard, quand j’avais déjà goûté le Tortuga, entre temps le verre s’est recouvert de givre:

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